Assise territoriale
[modifier]A l'origine, les Leuques et les
Médiomatriques ne sont pas cités parmi les peuples qualifiés de Belges par César, mais appartiennent vraisemblablement à la
Gaule Celtique[18]. Certains spécialistes supposent
[19] qu'ils appartenaient à la zone dite du "denier", zone économique du centre-est de la Gaule correspondant en partie à la sphère d'influence de Rome avant la conquête.
Cette province augustéenne de la Gaule Belgique était délimitée au sud par la Seine et à l'ouest par la
Marne et s'étendait jusqu'au Rhin ; elle englobait les trois cités mosellanes (Leuques, Médiomatriques,
Trévires) et leurs voisins occidentaux, les
Rèmes. Les voisins méridionaux des Leuques,
Lingons et
Séquanes, d'abord rattachés à la province de la
Gaule Lyonnaise ont été incorporés à la Belgique sans doute en 10 ou en 8 avant Jésus Christ.
Le manque de sources historiques disponibles pour l’époque gauloise nous réduit à extrapoler l’assise du territoire des Leuques à partir des découpages postérieurs. Aussi, leurs limites territoriales, comme la plupart des peuples de la
Gaule, sont définies de façon théorique à partir de la cartographie des diocèses antiques, ceux-ci étant considérés par les historiens comme émanant des limites des
cités gallo-romaines. Le territoire qui découle de cette analyse régressive se caractérise par sa forme très allongée. Il est limité à l’est par la ligne des sommets vosgiens, et à l’ouest par la vallée de la
Meuse. Au nord et au sud, la détermination de l’assise territoriale de la cité des Leuques repose sur les toponymes d’origine antique et ceux de signification frontalière, corrélés aux limites diocésaines
[20].
Il est possible, selon l'hypothèse de M. Burnand
[21], que les Leuques aient porté dès l'origine le statut de Cité alliée de Rome, jouissant en principe d'une autonomie totale, contrairement à leurs voisins médiomatriques qui ont acquis ce titre seulement après l'époque augustéenne. Ces différences de statut pourraient avoir eu des conséquences sur le développement précoce des cités.
L'
oppidum de
Nasium à
Boviolles (département de la Meuse) semble avoir été un centre politique leuque important, probable capitale au moment de la conquête romaine.
Plusieurs données confortent cette hypothèse :
Monnaie de la tribu des Leuques.
- La découverte d'un atelier monétaire au XIXe siècle[22] et le grand nombre de monnaies répertoriées sur le site (plus d'un millier actuellement)[23] signalent une fonction économique de premier plan pour ce site.
- D'une superficie de 60 à 80 hectares, cet oppidum est le plus étendu des leuques.
- Immédiatement après la conquête romaine, le site a profité d'une extension et de libéralités romaines exceptionnelles et incomparables sur l'ensemble du territoire leuque. En contrebas de l'oppidum, ex-nihilo, les romains construisirent la ville de Nasium qui, à son apogée, atteindra 120 hectares. C'est, avec Metz (Divodurum), la ville antique la plus étendue de Lorraine. Elle possède, entre autres, un ensemble monumental, pouvant être assimilé à un forum dans lequel un bâtiment à plan basilical (dont la fonction fait encore débat aujourd'hui) a été fouillé en 2007 et 2009, des thermes ainsi qu'un ensemble cultuel constitué d'une vingtaine de temples : l'apparat monumental classique des grandes villes romaines (la présence d'un édifice de spectacle est également avancée).
- Les répartitions des trouvailles monétaires sur le territoire des leuques, et plus particulièrement des statères et des bronzes frappés attribués sans contestation aux leuques[24] sont concentrées presque exclusivement autour et sur l'oppidum de Boviolles[25], ce qui le place au coeur non seulement du pouvoir économique, mais également politique de ce peuple.
Le site de hauteur de Boviolles a été abandonné au profit de la ville de Nasium au cours de la période romaine.
L'entité héritière, la cité de
Tullum s'étendait du bassin de la
Saulx au versant occidental des Vosges, au sud de la
Lorraine actuelle. Ces anciennes limites préservées sans aucun bornage connu par le diocèse de Toul des temps mérovingiens ont pu être retrouvées par des marqueurs ethnologiques.